La souveraineté


La tradition celtique distingue nettement pouvoir et souveraineté. Le pouvoir est exercé par le roi, mais sa légitimité, et sa capacité à l'exercer lui viennent de la femme détentrice de la souveraineté : la reine. C'est elle qui représente la terre, le territoire, et les romans arthuriens attestent bien des cas où le Chevalier, souvent au terme d'une épreuve qui prouve sa prouesse et sa valeur, se trouve investi par la Dame d'une seigneurie, d'un royaume. De même, c'est des mains, et de la magie de Mélusine que Raymondin (rex mundi, le "roi du monde") reçoit sa terre. C'est par la femme que se transmet le pouvoir, et de fait l'héritage revient couramment non au fils, mais au neveu, fils de la sœur (et telle est effectivement le lien entre le roi Mark et Tristan.

Une telle conception se comprend aisément si l'on considère la déesse qui incarne la terre-mère. Celle qui prodigue fruits et récoltes. Et le roi, privé de la Femme, perd non seulement sa virilité, mais aussi la source de l'abondance, garante de la prospérité du pays.

Bien sûr l'avènement de la société patriarcale a totalement inversé ce processus, qui n'était certainement pas limité à la société celte ; et c'est tout naturellement que l'on s'est habitué à voir le Roi investissant la Femme des insignes du pouvoir : le Christ couronnant sa mère, la Vierge Marie.

 

Bibliographie
. Jean Paul LELU, "Le souvenir de la royauté et de la souveraineté celtiques dans la toponymie, Bulletin de la Société de Mythologie Française, n° 193 et 201